Littérature japonaise contemporaine

  Pierrot-la-gravité





Haru et Izumi sont deux frères très liés depuis l'enfance. Haru est issu d'un viol subi par sa mère, mais les parents n'ont jamais caché cette réalité aux enfants et la famille est restée soudée autour de ce drame.
Izumi travaille pour une société de tests génétiques, tandis que Haru passe ses journées à nettoyer les tags de la ville. Quand d'étranges incendies se mettent à éclater ici et là, annoncés par de mystérieux graffitis, les deux frères décident de mener l'enquête. Les signes mis bout à bout forment un rébus dont ils s'efforcent de percer le sens.
Au-delà d'une énigme policière aux péripéties étonnantes, c'est la personnalité attachante des deux frères qui captive, ainsi que le charme des dialogues entre humour et émotion, émaillés d'interrogations sur le bien, le mal, et les questions éthiques posées par les progrès de la science.
On reconnaît dans ce roman la «marque de fabrique» d'Isaka Kôtarô : création d'un univers original, à la croisée du roman policier, du fantastique et du manga, et mise en place d'un puzzle auquel on peut être assuré que pas une pièce ne manquera lors du dénouement, toujours surprenant.

Né en 1971, ISAKA Kôtarô fait son apparition sur la scène littéraire japonaise en 2000 avec La Prière d'Audubon, paru aux éditions Picquier en 2011. Auteur prolifique et inclassable, il déploie un univers très original, au carrefour du thriller, du fantastique et du roman d'initiation, dans la filiation de Murakami Haruki.
Son succès auprès de la jeunesse japonaise ne se dément pas : il est l'auteur d'une série de mangas célèbre, Le Prince des ténèbres et cinq de ses romans, dont Pierrot-La-Gravité, ont déjà été adaptés au cinéma. 

 Avis

 Isaka Kotaro est un écrivain très connu au Japon , et ses œuvres sont peu édités en France actuellement.

Haru et Izumi sont deux frères aux personnalités opposés, liés par un drame familial. Haru est né d'un viol et malgré des parents aimants, qui ont dépassé avec courage et intelligence cette différence, il se sent marqué par ce destin. Son frère Izumi l'admire beaucoup et l'entoure autant qu'il peut. Leur mère est décédée depuis plusieurs années et leur père, atteint de cancer, est en fin de vie.
Une série d'incendie avec des symboles étranges sont commis dans la ville. Par jeu et par défi envers son père et son frère, Izumi se met à enquêter pour découvrir le sens de cette énigme. Au cours de son périple, il rencontrera une jeune fille singulière et d'autres personnes plus ou moins sympathiques. Redoutant une fin terrible, Il découvrira d'autres vérités, qui le lieront à jamais à son frère.

Ce roman est une ode à l'amour fraternel. Le lien entre les deux frères est subtilement décrit avec tous ces sentiments contradictoires : jalousie, envie, admiration, protection...On ressent beaucoup de tendresse entre les deux frères, certainement dû à cette histoire familiale mais surtout grâce à l’éducation tolérante et bourrée d'amour de leurs parents. L'histoire est originale : elle pourrait être glauque mais au contraire l'auteur en fait une leçon de tolérance et de résilience. L’énigme policière n'est qu'un prétexte pour explorer le parcours des deux frères depuis l'enfance. Ce sera aussi la fin d'une période de leur vie; à travers cette épreuve, chacun deviendra réellement adulte et pourra envisager une vie future sans les poids du passé.

Isaka Kotaro a un style fluide, agréable à lire. Le roman est intéressant mais je me suis parfois ennuyé. De plus, j'ai parfois eu du mal à suivre l'intrigue entre les allers retours incessants dans le passé des frères.  

 

La Prière d'Audubon

ISAKA Kotaro



Résumé éditeur
 Un jeune informaticien, Itô, se réveille un beau matin sur une île inconnue. Une île qui s'est refermée sur elle-même, il y a cent cinquante ans, au moment précis où le reste du Japon s'ouvrait au monde.Accompagné d'un étrange guide, il part à la découverte de l'île et de ses habitants, insolites et attachants : un peintre qui ment comme il respire, une fillette à l'écoute des battements de son c ur, un justicier poète amoureux des fleurs et, surtout, un épouvantail capable de prédire l'avenir. On retrouve bientôt ce dernier démembré aux quatre coins d'une rizière. Qui a commis cet acte abominable qui s'apparente à un meurtre ?Cette question est une clé ouvrant sur bien d'autres énigmes et morts inexpliquées.Héritier moderne d'Alice au pays des merveilles, Itô ira de découverte en découverte, au fil d'un récit haletant, où fantastique et humour s'ombrent de cruauté, tandis que l'intrigue, de disparitions en coups de théâtre, s'assemble brillamment comme un puzzle dont toutes les pièces trouveront leur place à la fin.

Avis
Ce livre est très représentatif de la littérature nippone, qui sait allié avec délicatesse plusieurs styles de romans : fantastique, policier et quête personnelle. Connu en France pour ces mangas, Isaka Kôtarô a rencontré le succès au Japon dès ce premier roman sorti en 2000. Seul Pierrot la gravité est actuellement édité.

Itô, informaticien au chômage, est dans une mauvaise passe : il connaît des difficultés avec sa compagne et n'est pas très motivé pour retrouver un poste. Poursuivi par un policier sadique, ancien camarade de classe de surcroît, Itô doit fuir après avoir braqué (et raté de façon magistrale) une supérette. Il se retrouve dans un ile étrange, coupée du monde moderne depuis des dizaines d'années. Seul un habitant a le droit d’en sortir pour ramener des objets modernes(ou personnes) . Les autres insulaires, eux, ont un comportements ou des habitudes plutôt bizarres : un peintre fou, après un drame personnel, dit toujours le contraire de ce qu’il pense et fait tous les jours les mêmes actions au même moment, un poète amoureux des fleurs « rend justice » en tuant quiconque semble se comporter mal, une fillette qui écoute le battement de son cœur... Le personnage le plus surprenant est, Yûgo,un épouvantail intelligent, qui connaît l’avenir depuis plus de 150 ans. Il suggère à Itô, de se rapprocher d'un aveugle, pour que celui ci lui raconte l’histoire de John James Audubon et des pigeons migrateurs américains. Itô ne comprend pas au départ le sens de cette requête. Lorsque l'épouvantail est tué en étant démembré et décapité, Itô se lance dans une enquête pour comprendre ce qui se passe vraiment sur cette île et les propos du défunt. Lors de cette quête, Itô découvrira ce qui « manque » à cette île, exorcisera certains des démons de son ancienne vie, mais surtout retrouvera de l'espoir.

Comme beaucoup de récits de Murukami, La prière d’Audubon est un roman initiatique, la découverte d’un univers décalé par un jeune homme perdu. De même pour les thèmes abordés, Isaka n’hésite pas à centrer son intrigue sur la relation avec l’occident. Tout d’abord par le biais de cette île isolée du reste du monde moderne, après avoir servi de passage essentiel entre le Japon et l’occident deux cents ans auparavant. Puis, par l’histoire du samouraï à l'origine et responsable de cette autarcie, enfin par le récit de la disparition dune race de pigeons migrateurs américains observée par John James Audubon (ornithologue connu pour ses dessins d’oiseaux au XIXe siècle).

L'’enquête policière n’est qu’un prétexte à explorer et révéler les mystères des insulaires : il permettra à Itô de se découvrir à travers cet environnement déroutant, mais les personnages sont suffisamment riches et fantastiques pour rendre cette histoire passionnante, dense et d’une grande originalité. Cela se lit très facilement, car le style de l'écriture est très fluide.



                                                                    ISAKA Kotaro

 

L'arbre du voyageur

Hitonari Tsuji



Résumé de l'éditeur
Peu après son entrée en primaire, il avait tranquillement quitté la maison. "L'école, ça ne lui a jamais beaucoup plu", disait ma mère avec un sourire fataliste. Mon frère était donc parti sur un coup de tête, sans que rien laissât deviner cette intention. Ces escapades se renouvelèrent. Parfois il ne rentrait pas de toute une journée, voire deux. "
Mais, devenu adulte, Yûji finit par disparaître pour de bon, sans plus jamais donner de nouvelles. Dix ans plus tard, son jeune frère décide de partir à sa recherche. Au cours de ce qui va vite faire figure de quête initiatique à travers les lieux cultes d'un Tokyo ultra-branché, il va découvrir tous les dangers qui guettent le " voyageur " égaré dans le monde moderne : la violence, la drogue, les sectes...
L'étrange personnalité de Yûji, qui inspire à la fois répulsion et bizarre sympathie, se révèle peu à peu, pour se dérober ensuite - jusqu'au coup de théâtre final. 

Avis 
L’arbre du voyageur raconte la quête d'un jeune homme à peine sorti de l’adolescence, suite au décès de ses parents : il veut retrouver son grand frère disparu une dizaine d’années auparavant. Ce grand frère, dénommé Yûji, s’est depuis toujours comporté d’une manière très singulière que ce soit avec sa famille, ses amis ou les êtres humains en général; fugues à répétition, actes violents et souvent gratuits, discours sibyllins voire blessants sont les reflets de la personnalité plutôt ambigüe de ce personnage, qui reste un mystère pour ses proches et qui semble s’être définitivement volatilisé.
Le personnage principale va tenter par tous les moyens de retrouver la trace de son ainé, dans Tokyo. Son enquête va le mener à rencontrer différents personnages, un collègue de travail de son frère, une ancienne petite amie qu'il a planté du jour au lendemain. au travers desquels il va découvrir une certaine part cachée de son frère, cynique, froide et égoïste. Il va surtout se découvrir lui-même et s’affranchir enfin de cette fascination presque maladive et de ce complexe d’infériorité, qui le poursuit depuis son enfance. Cette quête lui permettra de retrouver la trace de son frère mais pas de récréer des liens avec lui.
 
Hitonari Tsuji nous fait découvrir certains aspects de Tokyo et de la société japonaise. Une atmosphère trés spéciale entour ce livre. L'intrigue est située entre l'histoire d'amour, le parcours initiatique, le passage de l'adolescence à l'age adulte avec tous ces renoncements et adaptations, mais ce sont les rapports entre les humains et surtout la recherche de soi qui sont les thèmes principaux de ce road movie intérieur.
C'est un livre très riche sous ses aspects simples car il aborde finement les contradictions et la complexité de la relation fraternelle Pour bien démontrer ce rapport de force entre les deux personnages, Hitonari ne donne pas de nom du narrateur, qui reste pourtant le héros principal du récit, et se contente de le nommer en utilisant systématiquement des périphrases du genre: « le frère de… , le petit frère de..».Une grande part de l’énigme restera sans véritable explication.

 J'ai trouvé le dénouement surprenant, violent. C'est très à lire, dynamique. Une belle découverte 


HITONARI Tsuji

 La promesse du lendemain

 Hitonari Tsuji




 Qui est cette inconnue
Les réponses à ces questions soin à découvrir au fil des nouvelles de Hitonari Tsuji. Dans ces histoires en forme de fables, le poète se fait le chantre des amours qui naissent puis se fanent, de la solitude résultant de l'incommunicabilité, de la violence du monde. Ainsi, au détour de phrases pures, limpides, lumineuses, surgissent l'étrangère et les ténèbres.

Hitonari Tsuji est né à Tokyo en 1959. Créateur protéiforme, il incarne au Japon une certaine idée de la modernité artistique. Considéré comme un des chefs de fille d'une nouvelle génération d'écrivains, il a atteint une renommée internationale avec Le Bouddha blanc (Mercure de France, prix Femina étranger 1999) et En attendant le soleil (Belfond, 2004). 


Avis

Hitonari Tsuji est un auteur japonais dont les romans originaux ne peuvent laisser indifférents. Il s'en dégage une certaine poésie, dans une atmosphère un peu fantastique mais toujours très ancré dans le quotidien (l'arbre du voyageurs, le bouddha blanc). Dans cet ouvrage, les nouvelles sont très diverses et il est difficile de les commenter sans en dévoiler l'intrigue. Je me permettrais donc de reprendre la 4ème page, qui donne une présentation assez fine de la teneur et de l'ambiance de ses nouvelles.
Qui est cette inconnue qui se rend jour aprés jour à la poste pour observer le guichetier à la dérobée? Savez-vous que là où vit la jeune acacia, le temps n'existe pas? Pour quelle raison cet homme qui s'amuse des heures avec les pigeons se laisse-t-il envahir par une tristesse infinie au moment de rentrer chez lui? Quel est ce mal qui rend tous les habitants d'un pays sans nom incapables de chanter? Pourquoi ce petit garçon s'est-il choisit pour héros un SDF qui porte un sac de toile sur la tête, et pourquoi massacre-t-on soudain tous les chiens de son quartier? Coincée avec son petit ami tout en haut de la grande roue, cette femme trouvera-t-elle la force de lui dire qu'entre eux tout est fini?

Il se dégage de chacune de ces histoires beaucoup de sensibilité, une perception très fine et juste des difficultés relationnelles dans notre société contemporaine. Parfois, de l'espoir apparait  au détour d'une histoire d'amour qui se construit malgré les difficultés et les differences, mais le plus souvent, on ressent une certaine amertume devant ses hommes et ses femmes qui se détruisent ou s'autodetruisent. Le poids de la société et des conventions sociales produisent des non dits destructeurs, une incapacité à exprimer ses sentiments ou à vivre ensemble sereinement.
C'est magnifiquement écrit, pleins d’émotion et d'une sensibilité rare. Je n'ai pas apprécié toutes les nouvelles mais la très grande majorité m'ont beaucoup touché par leur réalisme et la justesse de ton.
 

La promesse du lendemain

Hitonari Tsuji








Présentation de l'éditeur

" Le coeur de Minoru bondit soudain dans sa poitrine. Son regard glissa lentement du cou d'Ottawa vers sa nuque, ses oreilles, sa bouche. C'est la première fois qu'il désirait une femme mai, naturellement, l'enfant de sept ans n'avait aucune conscience de  l'instinct sexuel qui germait en lui. Elle le prit dans ses bras. C'était un geste tendre de sœur aînée, mais en sentant contre lui les rondeurs féminines sous le kimono aux motifs indigo, une gêne indicible envahit Minoru"

Un terrible drame va séparer très tôt la séduisante adolescente et le petit garçon. Mais devenu un célèbre armurier, marié, père e six enfants, Minoru Eguchi n'oubliera jamais son premier amour. Au soir de sa vie, c'est vers son souvenir qu'il se tourne en même temps que vers un passé où les disparus tiennent de plus en plus de place. Naît alors en lui l'idée de faire édifier une statue de Bouddha à partir des cendres de tous les morts du village- dont Ottawa- réunis en une sorte d'égalité originelle.

Hitonari Tsuji, né à Tokyo en 1959, est très connu au Japon comme poète et comme chanteur de rock. Pour écrire le Bouddha blanc, il s'est inspiré de l'histoire de son grand-père. Auteur de plusieurs romans qui ont remporté un immense succès, il est considéré dans son pays comme un des chefs de file d'une nouvelle génération d'écrivains..


Avis

J'aime beaucoup en général les œuvres de  Hitonari Tsuji mais j'ai un avis assez mitigé sur ce roman, qui a eu au demeurant beaucoup de succès. Si la trame du récit est intéressante, je n'ai pas accroché sur les aspects fantastiques, voire mystique de cette histoire.

Un homme en fin de vie est entouré par ses proches. Sur ces derniers moments, il se souvient de son enfance, des moments marquants de sa longue vie et des personnes qu'il a rencontré. Minoru a un don qui lui permet d'avoir des vision sur l'avenir; de plus, un bouddha blanc lui apparait à chaque période charnière de sa vie. A travers ses réminiscences, on découvre la vie au Japon du début du siècle et surtout l'impact des péripéties de l'Histoire (guerres, avancées technologiques) sur le commun des mortels.

Hitonari Tsuji sait écrire avec beaucoup de fluidité et de délicatesse. J'ai beaucoup aimé sa vision du Japon, avec la prégnance très forte des traditions et le sens de l'honneur, qui conditionne bien des vies. Ce n'est pas angélique, loin de là, car les conditions de vies sont très dures et la vie n'épargne pas le personnage principal. Pourtant,  il se dégage une certaine nostalgie et tendresse, qui apportent beaucoup de douceur et d'harmonie au récit. Il y a une certaine réflexion sur ce que j’appellerais "la roue qui tourne" : l'entraide, la bienveillance et la compréhension de l'autre sont des éléments importants dans une vie, car chacun peut avoir besoin de l'autre a un moment de sa vie.
La dimension fantastique est courante dans la littérature japonaise contemporaine, ce n'est donc pas pour moi une surprise; mais pour ce roman, cela m'a semblé hors de propos, et n'apporte rien pour moi à la richesse de l'intrigue. Son don de vision est un plus pour sa personnalité et pour la dynamique du récit, mais je n'ai pas compris les apparitions d'un Bouddha blanc. 

 Conte de la première lune

HIRANO Keiichiro



Présentation de l'éditeur


Conte de la première lune est l'histoire d'un jeune poète romantique qui, pour soigner sa mélancolie, entreprend au siècle dernier un voyage au sud de Kyôto, une région connue pour la beauté de ses paysages et les pratiques magiques des ascètes bouddhistes qui y vivent. Mordu par un serpent venimeux, il est recueilli par un moine dans un ermitage au cœur des montagnes et rencontre en songe une femme dont il s'éprend. Mais où commence le rêve et où s'achève la réalité ? Telle est l'une des questions que suscite ce conte philosophique et poétique. où la lune se lève sur la beauté inoubliable d'une femme se lavant dans ses rayons, où l'intensité de l'épanouissement des fleurs et des sentiments coïncide avec l'instant de la mort, tandis qu'un papillon, délicat et magnifique, guide le voyageur dans le labyrinthe des illusions jusqu'au dénouement.

Avis 

Masaki est un jeune homme romantique et neurasthénique, qui a du mal à trouver un but à sa vie. Poète reconnu, il est à la recherche d''un idéal dans la passion, mais ne réussit pas à l'atteindre. Afin de se ressourcer, il décide de partir à l'aventure pour marcher comme à son habitude. Ce voyage sera pourtant étrange dés les quai de la gare : il rencontre une jeune fille, qui le trouble et un inquiétant vieillard, qui l’emmènera vers une autre destination à celle prévue initialement. De plus, le déroulement du temps semble être perturbé, au moment où un superbe et délicat papillon apparait dans le wagon. De même, Masaki perd toute notion de temps va s’égarer la forêt, en tentant de suivre le même papillon étrange, qui lui rappelle la jeune femme rencontrée dans la gare. La nuit tombée, la foret semble maléfique et une atmosphère étrange baigne la nature. Il est mordu par une vipère et recueilli par la moine En'yû. Durant son séjour, une femme magnifique lui apparait en rêve chaque nuit. Peu à peu, il en tombe amoureux et son étrange périple semble se transforme peu à peu en tragédie.

C'est un conte délicat, qui a le charme suranné de la littérature japonaise du début du siècle, que ce soit dans les thèmes abordés ou dans l'atmosphère qui s'en dégage.
Les thèmes principaux du roman sont l'ode à la beauté de la nature (les descriptions sont nombreuses et lyriques), l'amour tragique et impossible. Les personnages sont romantiques : sombres, torturés, pris dans une passion amoureuse qui les consument. Inexorablement, leurs choix et leur destin les dirigent vers une fin funeste, très courante dans la littérature japonaise : le suicide amoureux. Cette atmosphère sombre est tempérée par le côté fantastique des croyances populaires japonaises sur la puissance de la nature, sur les rêves et sur les femmes renards (superbes femmes qui envoutent les hommes).... De ce fait, le roman conserve une certaine ambiance surnaturelle malgré cet amour tragique.
L'écriture est très poétique, élégante, comme les sentiments et les personnages. 




HIRANO Keiichiro

 

Bleu presque transparent

MURUKAMI Ryû

 


Résumé de l'éditeur
Bleu presque transparent relate, en une succession de courts chapitres, quelques journées dans la vie d'un groupe d'adolescents. Journées ou plutôt nuits vides d'espoir d'une " génération perdue " et désillusionnée qui s'abîme dans la destruction. Sexe, drogue, musique, violence... le tableau serait d'une banale désespérance s'il n'y avait ce mélange de distance quasi clinique et d'infinie générosité dans le regard porté sur les personnages. Dans Tôkyô oppressante et triste, Ryû, Kei, Okinawa payent, dans leur corps qu'ils ruinent avec constance, l'absence d'âme d'une société. Et leur déchéance possède la couleur du bleu presque transparent de la pureté.

Avis
Une claque!!!! Déroutant devant tant de désespoir et de violence, décrit de l'intérieur par un junkie, appelé Ryû. Sans espoir, le lecteur attend la prochaine catastrophe, la violence qui transparaît à chaque page, ou désespoir plus profond encore. Terrible mais superbement écrit!!!!
On suit le parcours de Ryû, jeune junkie de 22ans, qui alterne les séances de défonces et de sexe débridé, avec Lili, sa compagne, et ses partenaires de galère. Ce qui peut choquer, c'est la crudité des scènes de sexe et la description très appuyée de la violence associée. Pourtant, derrière cette façade, transparait l'amour du jeune homme pour Lili, qu'il tente malgré tout de protéger. Ces jeunes gens crucifiés par la société modernes ne peuvent que répondre à leurs besoins primaires qui sont se nourrir (parfois), boire (que de l'alcool), se soulager (n'importe où fait l'affaire), dormir (idem que pour se soulager) et avoir des rapports sexuels (hetéros ou homos en fonction de l'état de défonce). Seul l'amour et l'attachement entre ces êtres abimés leur permet de conserver une part d'humanité en alternance avec ses périodes de déchéances de plus en plus profondes.

Vous allez me dire, quel est l’intérêt de ce roman, sinon un besoin morbide de voyeurisme ? J'ai ressenti  immédiatement les mêmes sensations du film Transpotting de Danny Boyle (1996) : c'est une sensation d'être bousculé, de voir tous ses repères d'une humanité cohérente explosée, d'être évidemment touché par le profond désespoir de ces jeunes gens, d'être confronté directement par cette réalité crue et cruelle de millions de personnes, que l'on souhaite oublier ou nier la plupart du temps. Ce livre a reçu le prix Akutagawa en 1976 (le Goncourt japonais). Le roman devient un immense succès commercial et Murakami, lui-même, en fait un film en 1978.
L'écho qu'a eu cette œuvre mérite qu'on s'y attarde et surtout que l'on réponde à la volonté de l'auteur, que l'on s'interroge sur ce que la société peut offrir à cette jeunesse.

 Murukami Ryû


 

Love and Pop

MurakamiRyû

 

Résumé éditeur
 Love & Pop aborde une forme de prostitution propre au Japon, dont Murakami avait déjà fait le sujet troublant de son film Tokyo Decadence. Par l'intermédiaire de messageries téléphoniques, de jeunes lycéennes acceptent des rendez-vous avec des inconnus pour pouvoir s'acheter des produits de marque. Le roman raconte la journée d'une jeune fille qui, désirant absolument s'offrir une topaze impériale, accepte coup sur coup deux rendez-vous avec des hommes. Mais les rencontres ne vont pas se passer comme elle l'avait prévu. La littérature n'a que faire des questions de moralité, dit Murakami Ryû, qui a construit son roman à la manière d'une œuvre d'Andy Warhol, en fondant dans la narration des bribes de conversations, d'émissions de radio ou de télévision, des litanies de marques, de titres de films ou des paroles de chansons à la mode. Comme un bruit de fond faisant soudain irruption au premier plan pour saturer le sens de ces rencontres qui ouvrent sur tous les possibles de l'humain. Tandis qu'une violence latente se fait de plus en plus pressante et précise.


Avis
Murakami Ryû est un auteur, qui dissèque implacablement, parfois cruellement, les travers et les dérives de la société nippone. Dans cet ouvrage, l'auteur s'attaque à la prostitution occasionnelle des collégiennes et lycéennes.

Hiromi, 15 ans environ, participe avec ses amies à des rencontres dans des bars avec des hommes plus âgés, qui souhaitent avoir la compagnie de jeunes (très jeunes) filles pour passer la soirée. Certaines de ses amies ont déjà eu des relations sexuelles tarifées. Si la plupart de ces rencontres ressemblent plus à un besoin de présence féminine, que la codification extrême des relations japonaises inhibent, Hiromi passera la cap afin d'obtenir un bijou. Pour ce besoin consumériste, elle acceptera de rencontre deux hommes à travers un numéro de téléphone, réservé à ce type de rendez- vous. Dans la première rencontre, elle rencontrera le désespoir, la solitude et le dégout aussi . Lors de le seconde rencontre, elle ressentira la terreur, une peur viscérale avec un psychopathe tueur, qui parle à une peluche. Elle ne ressortira pas indemne de cette journée et de ces rencontres.

On ne peut ressentir que du malaise devant ces jeunes filles qui se vendent pour répondre à une société consumériste. Il y a une critique virulente de la société de consommation qui pervertit sa jeunesse. La société japonaise est tellement en difficulté dans ses relations à l'autre et dans ses relations amoureuses, que les hommes achètent du temps, un peu d'attention, un peu de tendresse auprès de jeunes filles immatures. Le risque, que prennent ces jeunes filles, semblent très surprenant dans nos sociétés occidentales. Le roman se déroule sur une soirée mais tout va très vite, c'est très rythmé. Il y a peu d'espoir dans ce roman pour la jeune génération. J'ai moins aimé les multiples digressions et descriptions, qui m'ont un peu agacés et qui n'apportent pas grand chose à l'intrigue sauf du ralentissement.
 
MURAKAMI Ryû

 

Miso soup

MURUKAMI RYU


Présentation de l'éditeur
Kenji, un jeune Japonais de vingt ans, gagne sa vie en guidant des touristes dans le célèbre quartier louche de Kabukichô, à Tôkyô. C'est en compagnie de Frank, un client américain, qu'il parcourt durant trois nuits les lieux de plaisir de Shinjuku : trois nuits de terreur auprès d'un meurtrier inquiétant avec qui il joue au chat et à la souris. Ce roman court et percutant laisse une sorte d'amertume, un goût métallique pareil à celui du sang qui imprègne ces pages minutieuses décrivant - comme l'auteur l'avait magistralement fait dans son roman Les Bébés de la consigne automatique - l'agonie d'un monde sans âme et voué à la solitude. " La littérature, nous dit Murakami, consiste à traduire les cris et les chuchotements de ceux qui suffoquent, privés de mots... En écrivant ce roman, je me suis senti dans la position de celui qui se voit confier le soin de traiter seul les ordures. "

Avis
Le quartier de Kabukichô, à Tokyo est le quartier des clubs de rencontre, de peep shows, de "lingerie pubs" et autres endroits dédués au sexe sous toutes les perversions possibles. Kenji, jeune homme de vingt ans, qui gagne sa vie en guidant les touristes dans ce quartier, va connaitre 3 jours et nuits en enfer. Franck, l'Américain, a besoin d'un guide pour quelques jours, mais la personnalité de celui-ci résonne en Kenji comme un danger. Il ne se douta pas à quel point cet homme différent est dangereux. Je ne peux dévoiler le reste de l'histoire, sans en diminuer l’intérêt mais je peux dire que la tension monte d'un cran à chaque page.
Encore une fois, Ryû Murakami décrit implacablement les dérives de la société japonaise. Il existe une forte pression sociétale (études, travail...), qui laisse les plus faibles ou fragiles dans une grande précarité. Pour cela, chacun va au delà des limites du tolérable pour s'en sortir. C'est cette déchéance que décrit l'auteur : jusqu'où doit on supporter l’intolérable? existe-t-il même une limite à l'horreur ? comment conserver une certaine estime de soi lorsque l'on cotoît le malheur, la perversion, la débauche ?
De plus, Murakami Ryù crée un tueur en série particulièrement redoutable, froid, calculateur et étrange. C'est ce caractère fantastique qui rend, par ailleurs, tolérable les scènes de massacre, de plus en plus réelles, précises. L'emprise psychologique du tueur sur le jeune homme est aussi finement restituée : on ressent l'emprise progressive, comme les tentacules d'un insecte malfaisant, de Franck sur le jeune Kenji. On ressent presque physiquement le malaise qui se transforme en crainte, puis en peur et enfin en terreur. C'est une lecture qui ne peut laisser insensible : un certain malaise s'en dégage, comme beaucoup des écrits de Murakami. Sa volonté de choquer est volontaire, mais le lecteur peut ne pas apprécier la violence et la désespérance, qui s'en dégage.

 

Chansons populaires de l'ère Showa

Murakami Ryü




Présentation de l'éditeur

Six jeunes paumés dépourvus d’émotions et de buts dans la vie entrent en guerre avec six femmes de la fin de la trentaine, divorcées en manque d’amour, dans une spirale de violence qui voit les cadavres s’accumuler avant de culminer en une explosion atomique qui raye de la carte tout un quartier de Tôkyô.
Étrangement, la confrontation à cette extrême violence rompt leur solitude et donne enfin un sens à leur vie. « Seul le meurtre conserve de nos jours une signification », ainsi que l’affirme l’un d’eux.
Murakami a écrit une fable très noire, qui est aussi un karaoké littéraire jouant avec les références aux mangas, à la culture urbaine et aux chansons populaires japonaises de la fin du vingtième siècle.

L’auteur : Murakami Ryû est reconnu comme l’un des chefs de file de la littérature contemporaine japonaise. Il publie son premier roman, Bleu presque transparent, en 1976 qui obtient la même année le prestigieux prix Akutagawa, l’équivalent du Goncourt au Japon. Mais c’est dans Les Bébés de la consigne automatique que son talent se confirme. Dans un style déroutant mêlant la poésie à des images de bande dessinée, avec une imagination foisonnante, Murakami offre une vision de cauchemar du Japon de la fin du vingtième siècle, et un reflet à peine déformé de notre monde moderne. 

Avis 
Encore une fois Ryû Murakami nous entraine dans un monde délirant où la violence et l'absence de relations humaines dominent. C'est noir, violent, marqué par le désespoir et l'absence d'avenir.

Dans une ville quelconque, un groupe composé de jeunes hommes désœuvrés, liés par l'alcool et le désœuvrement, font des karaokés délirants. En parallèle, un groupe de jeunes femmes s'est constitué par mimétisme (elles ont toutes le même prénom) même si les relations restent plutôt superficielles. Le meurtre sans objet d'une des leurs par un de ces hommes va entrainer les membres de ces deux groupes dans une escalade de violence mortelle pour la majorité d'entre eux. Pourtant, c'est ce parcours teinté de sang qui va faire émerger des relations humaines teintés de sincérité et d’émotion.

Le monde décrit par Murakami Ryû est effrayant :  les hommes se côtoient sans réellement échanger chacun emmuré dans sa solitude et son égoïsme. La violence est le seul moyen qui les font se sentir vivant et les sorte de leur léthargie. Il y a une critique acide de la société contemporaine qui fait naître des hommes et des femmes n'ayant aucune morale, aucun objectif, aucune capacité à communiquer même avec les membres les plus proches.La société comble leur manque mais ne font pas d'eux des êtres sensible et sensibilisés. 

C'est très bien écrit, facile à lire et le style de Murakami est toujours aussi efficace. Les événements les plus horribles sont présentés comme des scènes irréelles, avec une touche d'ironie et d'absurde qui m'a beaucoup fait penser au style shonen de certain manga (one piece...). La psychologie des differents personnages est aussi très juste : on comprend bien leur mode de fonctionnement et les racines de leur mode de pensée désaxée. J'ai été très touché par la fin de ce livre :e chaos final est poignant mais contrebalancée par une certaine ironie.

Kyoko

MURAKAMI Ryû

 



Présentation de l'éditeur

Dans son roman le plus récent, au ton volontairement plus léger que celui des Bébés à la consigne automatique, Murukami a voulu écrire, selon ses propres termes, un "roman sans drogue, sans violence et sans sexe, sur la renaissance et l'espoir."
Kyoko a vingt ans. elle est venue à New York à la recherche d'un souvenir d'enfance. Dans cette histoire d'un voyage à travers les États-Unis qui adopte une forme polyphonique, l'auteur donne tour à tour la parole aux differents personnages qu'elle croise. Obstinée et ingénue, animée d'un surprenant enthousiasme pour la vie, Kyoko les entraine malgré eux dans son sillage. Son amour des êtres, sa tendresse et sa compassion naturelle éblouissent autour d'elle les couleurs désastreuses de la vie et renouent les fils de l'espoir pour les amis de rencontre.
Véritable quête intérieure, dans un monde multiracial en proie à la violence, Kyoko est un roman initiatique. Un conte moderne dont la justesse de ton et la sobriété de langage réussissent à maintenir le lecteur dans un perpétuel état d'alerte et d'émotion.

Avis

Si je pouvais définir ce roman en un mot ce serait la grâce. Il se dégage de ce roman de la bienveillance, de la compassion, de la tendresse et beaucoup d'espérance. C'est d'un style tout à fait différent des autres œuvres de Murakami Ryû,  mais c'est une vraie réussite.

Kyoko, jeune et jolie japonaise de vingt ans, veut retrouver José. Celui ci était G.I et il lui a appris à danser durant quelques mois, alors qu'elle n'était qu'une petite fille de 8 ans. C'est vital pour elle de le retrouver pour le remercier, car elle dit qu'il l'a sauvé. Elle va le retrouver en phase terminale du sida, la mémoire en déroute et le corps ravagé par la douleur. Pourtant, elle l'accompagnera dans son dernier voyage pour le ramener à sa famille. José mourra dans la dignité et heureux, tandis que Kyoko, trouvera le moyen de se débarrasser de sa souffrance. Durant ce voyage, elle transformera la vie d'un certain nombres de personnes, qui seront touchés par sa personnalité et sa bienveillance.

C'est un road movie initiatique où Kyoko rencontrera tous les exclus des Etats-Unis : noir, latinos, gay, toxico, voleur, sidéen... C'est une fée, douce et fragile mais dotée d'un fort caractère. Sa personnalité unique détonne dans la société traditionnelle américaine, pourtant elle fera de riches rencontres, voire des amis. Sa douceur, son innocence et sa bienveillance désarmeront au sens figuré les âmes les plus corrompus par la société contemporaine. Ce récit se déroule comme un conte mais il n'a rien d'un conte de fée : la société est implacablement décrite avec ses insuffisances et ses injustices. La fin n'est pas à proprement heureuse mais l'espoir domine.

Le récit à plusieurs voix où chacun des personnages racontent sa rencontre avec Kyoko donne du rythme, et permettent de comprendre la psychologie, le passé et la vie de chacun des nombreux personnages secondaires. Il se dégage de ses reflexions personnelles beaucoup de chaleur, et d’émotions. Murakami a un style très précis, exhaustif, facile à lire mais ce qui est marquant c'est cette grâce qui se dégage de chaque page. Un gros coup de cœur pour ce roman qui m'a enchanté. 

 

Manuscrit zéro

OGAWA Yoko



Présentation de l'auteur

Depuis 1995, les livres de Yôko Ogawa sont traduits en français. Nouvelles, romans courts, ou plus longs ces dernières années, nous ont peu à peu révélé les questionnements de la romancière japonaise et la singularité de son imaginaire comme autant de transpositions du réel. Aujourd'hui, telle une pause formelle et dans une langue beaucoup plus immédiate, Manuscrit zéro s'impose au coeur de son oeuvre. Alors que la romancière travaille à un nouveau projet, elle note au jour le jour ce qui compose son quotidien fictionnel. A moins qu'il ne s'agisse de l'inverse : notant chaque jour la multitude d'histoires qui peuplent son imaginaire, Yôko Ogawa tente de trouver dans cette forêt d'images la tonalité de son nouveau roman ; elle tisse et conjugue les influences et les figures qui soudain l'interpellent, qu'elles soient issues de l'instant ou des tourbillons de sa mémoire, de rencontres bien réelles ou d'émotions enfouies. Selon ce motif se glissent entre ces pages le murmure d'un torrent dans une forêt profonde où prolifèrent des mousses délicates et délicieuses, une maison d'enfance impossible à décrire, une fête d'école où il s'agit de se faire passer pour une mère d'élève. Un concours de pleurs d'enfants et l'étrange destinée d'un touriste en retard. Des histoires courtes qui s'enchaînent comme autant de composantes de l'oeuvre de Yôko Ogawa, des histoires qui forment une mosaïque temporelle au sein de laquelle les individus, les lieux ou les situations vont chavirer, chanceler, pour rejoindre sous sa plume le monde si singulier de ses personnages.
Yoko Ogawa est née en 1962. Elle vit au japon et se consacre à l'écriture. Elle a obtenu le prestigieux prix Akatagawa pour La Grossesse (Actes Sud, 1997). Tous ses livres sont publiés aux éditions Actes Sud.

Avis

Cela faisait longtemps que je souhaitais lire Yôko Ogawa et je ne suis pas déçue. Il existe une certaine similitude avec l'atmosphère que l'on rencontre dans les livres de Haruki Murakami : étrangeté, une certaine lenteur, la rencontre avec des personnages improbables....

Ce récit à la première personne est celui d'une jeune romancière, qui nous raconte son quotidien, ses rencontres, les événements marquants de sa vie à travers diverse chapitres.Il est construit comme une succession de saynètes mais avec une certaine cohérence et continuité : certains chapitres sont éclairés sous un autre aspect par les suivants, certains personnages évoluent. Un des chapitres est dévolu à sa grand-mère, attachée à deux étranges personnages, une autre à une fête de sport dans une école maternelle où elle s’immisce, une autre à son métier d'auteur de grandes lignes,  une autre à une étrange visite guidée sur l'art moderne.....Certaines sont carrément  fantastiques, d'autres touchantes ou plus intimistes. J'ai trouvé magnifique celle sur sa capacité de créer les grandes lignes d'un livre et sur sa lecture de ses œuvres sous cet forme à un vieux romancier. La toute première sur le magasin de chaussures est poignante : on ne peut que ressentir toute la détresse et la souffrance de l'auteur, devant l’inéluctabilité de la séparation et l'impossibilité désormais de partager ces moments. L'écriture est vraiment magnifique malgré sa simplicité : c'est poétique, les phrases sont ciselées, beaucoup d’émotions et de tendresse transparaissent dans ces passages.

Ce qui est marquant c'est l'apparition progressive du portrait d'une femme excessivement seule. Un peu décalée, elle fuit (ou ne peut construire de réelles) les relations humaines, car elle éprouve des difficultés à exprimer ses émotions. Elle semble donc évoluer à la marge, sans réelles attaches. A chaque fois qu'elle se rapproche d'une personne, celle ci s'éloigne plus ou moins volontairement (mort, maladie, disparition, relations amoureuse ...). Ses loisirs, ses joies sont surprenants, mais prennent sens au regard de sa profonde solitude.
Ce roman s'imprime dans votre conscience car beaucoup de tristesse et de solitude se dégagent de ce roman. Pourtant, son caractère poétique et un peu étrange lui confère une certaine légèreté et douceur.

 OGAWA Yôko


 

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