vendredi 5 octobre 2012

Manuscrit Zéro

OGAWA Yôko


Présentation de l'auteur

Depuis 1995, les livres de Yôko Ogawa sont traduits en français. Nouvelles, romans courts, ou plus longs ces dernières années, nous ont peu à peu révélé les questionnements de la romancière japonaise et la singularité de son imaginaire comme autant de transpositions du réel. Aujourd'hui, telle une pause formelle et dans une langue beaucoup plus immédiate, Manuscrit zéro s'impose au coeur de son oeuvre. Alors que la romancière travaille à un nouveau projet, elle note au jour le jour ce qui compose son quotidien fictionnel. A moins qu'il ne s'agisse de l'inverse : notant chaque jour la multitude d'histoires qui peuplent son imaginaire, Yôko Ogawa tente de trouver dans cette forêt d'images la tonalité de son nouveau roman ; elle tisse et conjugue les influences et les figures qui soudain l'interpellent, qu'elles soient issues de l'instant ou des tourbillons de sa mémoire, de rencontres bien réelles ou d'émotions enfouies. Selon ce motif se glissent entre ces pages le murmure d'un torrent dans une forêt profonde où prolifèrent des mousses délicates et délicieuses, une maison d'enfance impossible à décrire, une fête d'école où il s'agit de se faire passer pour une mère d'élève. Un concours de pleurs d'enfants et l'étrange destinée d'un touriste en retard. Des histoires courtes qui s'enchaînent comme autant de composantes de l'oeuvre de Yôko Ogawa, des histoires qui forment une mosaïque temporelle au sein de laquelle les individus, les lieux ou les situations vont chavirer, chanceler, pour rejoindre sous sa plume le monde si singulier de ses personnages.
Yoko Ogawa est née en 1962. Elle vit au japon et se consacre à l'écriture. Elle a obtenu le prestigieux prix Akatagawa pour La Grossesse (Actes Sud, 1997). Tous ses livres sont publiés aux éditions Actes Sud.

Avis

Cela faisait longtemps que je souhaitais lire Yôko Ogawa et je ne suis pas déçue. Il existe une certaine similitude avec l'atmosphère que l'on rencontre dans les livres de Haruki Murakami : étrangeté, une certaine lenteur, la rencontre avec des personnages improbables....

Ce récit à la première personne est celui d'une jeune romancière, qui nous raconte son quotidien, ses rencontres, les événements marquants de sa vie à travers diverse chapitres.Il est construit comme une succession de saynètes mais avec une certaine cohérence et continuité : certains chapitres sont éclairés sous un autre aspect par les suivants, certains personnages évoluent. Un des chapitres est dévolu à sa grand-mère, attachée à deux étranges personnages, une autre à une fête de sport dans une école maternelle où elle s’immisce, une autre à son métier d'auteur de grandes lignes,  une autre à une étrange visite guidée sur l'art moderne.....Certaines sont carrément  fantastiques, d'autres touchantes ou plus intimistes. J'ai trouvé magnifique celle sur sa capacité de créer les grandes lignes d'un livre et sur sa lecture de ses œuvres sous cet forme à un vieux romancier. La toute première sur le magasin de chaussures est poignante : on ne peut que ressentir toute la détresse et la souffrance de l'auteur, devant l’inéluctabilité de la séparation et l'impossibilité désormais de partager ces moments. L'écriture est vraiment magnifique malgré sa simplicité : c'est poétique, les phrases sont ciselées, beaucoup d’émotions et de tendresse transparaissent dans ces passages.

Ce qui est marquant c'est l'apparition progressive du portrait d'une femme excessivement seule. Un peu décalée, elle fuit (ou ne peut construire de réelles) les relations humaines, car elle éprouve des difficultés à exprimer ses émotions. Elle semble donc évoluer à la marge, sans réelles attaches. A chaque fois qu'elle se rapproche d'une personne, celle ci s'éloigne plus ou moins volontairement (mort, maladie, disparition, relations amoureuse ...). Ses loisirs, ses joies sont surprenants, mais prennent sens au regard de sa profonde solitude.
Ce roman s'imprime dans votre conscience car beaucoup de tristesse et de solitude se dégagent de ce roman. Pourtant, son caractère poétique et un peu étrange lui confère une certaine légèreté et douceur.

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